Après dix ans d'interruption pour cause de guerre, les voitures s'alignent à nouveau au départ des Vingt-Quatre Heures du Mans. Nous sommes le 25 juin 1949. Deux petites voitures rouges d'une nouvelle marque italienne étonnent les pilotes des écuries glorieuses que sont Talbot, Delahaye, Bugatti ou encore Delage... Les Ferrari n° 22 et 23, des 166 MM, dont l'une va remporter l'épreuve, lieront à jamais le nom de la marque transalpine à ce petit coin du département de la Sarthe. Ce fut le début d'une longue histoire d'amour : de 1949 à 1984, ce ne sont en effet pas moins de 263 Ferrari qui prendront le départ du Mans, avec un total de neuf succès au classement général, dont six consécutifs dans les années 60. Il est aujourd'hui difficile de discerner qui doit le plus à l'autre : est-ce l'épreuve des Vingt-Quatre Heures du Mans qui apporta une partie de sa gloire à Ferrari ou est-ce Ferrari qui donna de l'éclat au Mans ? La question reste en suspens.
Ferrari au Mans, ce sont les voitures engagées directement par la marque, les officielles mais ce sont aussi les voitures engagées par l'intermédiaire des écuries privées. Qu'il s'agisse des unes ou des autres, tous les pilotes se retrouvaient à égalité pour affronter la chaleur ou le froid, la poussière ou la pluie, la fatigue et même quelquefois la peur. Il y eut de, années glorieuses, comme 1960 où, sur douze Ferrari au départ, six furent à l'arrivée dans les sept premières places, avec un doublé des Testa Rossa. L'année d'après, trois voitures se trouvent encore aux trois premières places, puis, en 1962, Ferrari enregistre sa sixième victoire avec quinze bolides au départ et cinq à l'arrivée. La période dorée prendra fin en 1965, après neuf victoires, record que seul Porsche pourra égaler, mais beaucoup plus tard. Il y eut aussi les années noires : aucune voiture à l'arrivée sur les cinq engagées en 1950. la prédominance de Mercedes en 1952 ou les succès volés par Jaguar ou par Ford. Quoi qu'il en fût, les duels Ferrari-Talbot, Ferrari-Jaguar, Ferrari-Ford ou Ferrari-Porsche fournirent à la presse de multiples occasions de gros titres et permirent à plusieurs générations de journalistes de noircir des quantités de colonnes où s'étalaient pronostics et supputations. Que ce soit pour ou contre, en bien ou en mal, peu importe du moment que l'on en parle, on participe de toute façon à la légende...
La
Ferrari 250 GTO jouit depuis les années 80 d'un prestige unique. À
cette époque, le marché de la voiture de collection fut saisi d'une
passion incontrôlée, le million de dollars devenant la seule unité
de mesure dès lors que l'on évoquait ce modèle.
La 250
GTO, qui fut présentée pour la première fois le 22 février
1962, était directement dérivée de la berlinette 250 GT swb,
dont elle n'était aux yeux de l'usine qu'une évolution, puisque
le règlement des compétitions GT exigeait qu'il fût produit
100 exemplaires pour décrocher la fameuse homologation. Ferrari fabriqua
probablement 39 exemplaires de 250 GTO, aujourd'hui rigoureusement répertoriés.
Dessinée par Scaglietti, la première 250 GTO était décorée
sur toute sa longueur du fameux ruban vert, blanc et rouge du drapeau national
italien. Elle était équipée du moteur V12 à 60°
de 2 953 cm3, comme la 250 GT. Son appellation répondait à
la technique particulière en usage dans la marque : 3 000 cm3
divisés par le nombre de cylindres, soit 250. Le V12 était alimenté
par six carburateurs double corps Weber 36 DCN, ce qui lui permettait de développer
quelque 310 ch à 7 500 tr/min, et sa suspension était celle de la
250 à empattement court, agrémentée de ressorts hélicoïdaux.
La 250 GTO ainsi préparée était capable d'atteindre la vitesse
fabuleuse de 280 km/h. Le "0" comme omologata, qui change tout et la
caractérisa, affirmait donc sa conformité au règlement GT
lors de son apparition outre-Atlantique. Il fut conservé par la suite,
d'où le label "Gran Turismo Omologata". En fait, il fut produit
plusieurs séries de la 250 GTO. La plus classique fut la 1, dotée
du moteur 3 l, mais il y eut trois 250 GTO dans lesquelles on installa un moteur
de 4 l afin de les engager en catégorie prototypes. Elles étaient
plus puissantes d'une centaine de chevaux et se distinguaient par un bossage particulièrement
proéminent sur le capot. Les cinq dernières 250 GTO furent fabriquées
en 1964 sur une carrosserie un peu plus longue et plus effilée.
Cette
superbe automobile fit sa première apparition aux Douuze Heures de Sebring
en mars 1962, confiée à Phil Hill et Olivier Gendebien : ils s'imposèrent
en catégorie GT, décrochant la seconde place du classement général;
le succès fut immédiat. Pour l'occasion, la voiture avait été
dotée d'un spoiler riveté à l'extrémité arrière,
équipement intégré par la suite à la carrosserie.
Ainsi, sa carrière sportive fut vite très brillante. Non seulement
dans sa catégorie, mais surtout aux Vingt-Quatre Heures du Mans, toujours
en 1962, au cours desquels Pierre Noblet et jean Guichet terminèrent à
la seconde place, et bien sûr à la première de la catégorie
GT. Enfin. la voiture conquit le titre de championne du monde grand tourisme en
1962, 1963 et 1964, tandis que deux GTO se plaçaient aux deux premières
places à Sebring en 1963.
EN 1962, L'ARRIVÉE DE LA 250 GTO PROVOQUA UN VÉRITABLE CHAMBARDEMENT. LE CAHIER DES CHARGES DE CETTE VOITURE RÉPONDAIT À UN PRINCIPE SIMPLE : UTILISER LA BERLINETTE POUR FAIRE UNE VOITURE PETITE ET LÉGÈRE. CE DONT ON POURRAIT DOUTER. A L'INTÉRIEUR, LA GRILLE SURÉLEVÉE DU LEVIER DE VITESSES TOUT COMME LES CADRANS ET LA TRAPPE DE REMPLISSAGE DU RÉSERVOIR D'ESSENCE PARTICIPENT À L'AMBIANCE COURSE. QUELQUES TROUVAILLES AÉRODYNAMIQUES ET MÉCANIQUES - COMME L'ADOPTION D'ARBRES À CAMES PLUS POINTUS -, DE SUPERBES ROUES À RAYONS, DE NOUVEAUX COLLECTEURS D'ÉCHAPPEMENT ET UNE DOUBLE RANGÉE DE SIX CARBURATEURS DOUBLE CORPS WEBER TYPE 36 DCN FINISSENT DE FAIRE DE LA 250 GTO PEUT-ÊTRE LA FERRARI PAR EXCELLENCE. ON PEUT AJOUTER QUE, DES 1963, FACE AU SUCCÈS DE LA VOITURE, ENZO FERRARI AVAIT DÉCIDÉ QU'ELLE SERAIT CONFIÉE EXCLUSIVEMENT À DES PILOTES DE TRÈS GRAND TALENT. A SES YEUX, LA 250 GTO ÉTAIT EN EFFET UNE VOITURE D'EXCEPTION, STRICTEMENT RÉSERVÉE À LA COMPÉTITION. EN 1963, UNE FERRARI 250 GTO VALAIT 20 000 DOLLARS. ELLE S'ÉCHANGEA POUR LA MOITIÉ DE CETTE SOMME DURANT LES ANNÉES 70... AVANT DE S'ENVOLER BIEN AU-DELÀ DES 10 MILLIONS DE DOLLARS DURANT LES ANNÉES 80.
La
250 GT fut présentée pour la première fois en 1954. À
côté d'une ligne aérodynamique conforme à d'ambitieuses
performances, on trouve à son bord chauffage, larges portes, confort correct
et coffre à bagages digne de ce nom. Mais pour les puristes, le modèle
de référence restera à jamais la 250 "châssis
court" (- 20 cm, 2,40 m au lieu de 2,60 m). Théoriquement aussi à
l'aise sur la route que compétitive en sport, elle était surtout
plus maniable et plus légère que sa devancière. Sous le capot
avant battait le coeur de la 250 GT : un V12 de 2 953 cm3 équipé
de trois carburateurs Weber double corps qui développait environ 280 ch.
La 250 GT devint "Tour de France" après la victoire dans la célèbre
épreuve, qui mêlait épreuves sur route et sur circuit, en
1956 de De Portago. Il ne s'agissait pas là d'une première, puisque,
après la victoire de 1951 et les secondes places de 1952 et 1953, c'est
une série de triomphes sans faille que s'offrirent les représentantes
de Maranello entre 1954 et 1961. Après les berlinettes longues et courtes
fut exposée la 250 GT swb, dotée d'une carrosserie en aluminium
et d'un intérieur parfaitement simple, voire spartiate.
À l'occasion
des Vingt-Quatre Heures du Mans de 1960, les Ferrari prirent non seulement les
deux premières places mais aussi sept des huit premières positions.
Pour beaucoup des amoureux de la 250 GT, quelle que soit sa version, elle demeure
la mère et le fleuron de toute la lignée des fabuleuses GT Ferrari.
Une référence. Pourquoi 250 LM? Parce que Le Mans, parce que rêve
de succès et de gloire! En fait, cette étonnante 250 LM, née
en 1963, connut une carrière curieuse. Imaginée pour ferrailler
en catégorie GT, elle ne fut jamais reconnue comme telle par la CSI, qui
exigeait des GT qu'elles fussent à double usage : route et circuit. La
production de ce modèle ne dépassa pas une quarantaine d'exemplaires,
et tous finirent éparpillés au gré et à la fortune
de particuliers qui lui permirent de récolter quelques lauriers. Conçue,
donc, pour les circuits, la 250 LM était une voiture de course à
habitacle fermé où deux personnes auraient pu prendre place. Cela
ne suffit pas à l'époque pour déboucher sur un modèle
de tourisme, ce qui ne fut d'ailleurs jamais le cas d'une Ferrari à moteur
central V12. À noter que cette 250 LM fut la dernière Ferrari victorieuse
au Mans du vivant d'Enzo Ferrari. Autre étrangeté, seule la première
250 LM fut équipée du classique V12 de 3 l de cylindrée,
toutes les suivantes héritant du moteur de 3,3 l, ce qui leur valut par
la suite l'appellation réglementaire de 275 LM. Seules deux 250 LM furent
assemblées à l'usine en vue d'une utilisation routière. Peine
perdue
il fallait vraiment être un esthète du genre pour rouler
en 250 LM.
BIEN QU'ELLE NE FÛT PAS CONÇUE DANS CE BUT, LA 250 LM POUVAIT ÊTRE UTILISÉE SUR LA ROUTE. PARFAITEMENT CONFORME À LA RÉGLEMENTATION, ELLE N'ÉTAIT TOUTEFOIS PAS TRÈS HAUTE ET EXIGEAIT UNE ATTENTION CERTAINE. SES PROPORTIONS SURPRENANTES ÉTAIENT JUSTIFIÉES BIEN ÉVIDEMMENT PAR L'INSTALLATION DU V12 DE 3 L EN POSITION CENTRALE ARRIÈRE. SON MANIEMENT, EN PARTICULIER CELUI DE LA BOÎTE DE VITESSES NON SYNCHRONISÉE, ÉTAIT ASSEZ DÉLICAT. SA CARRIÈRE DÉMARRA DE MANIÈRE MODESTE, PUISQUE, CONFIÉE AUX MAINS DE L'ÉQUIPE NART DE LUIGI CHINETTI, ELLE ABANDONNA LORS DE SA PREMIÈRE COURSE, TERMINA HUITIÈME DE LA DEUXIÈME ET FUT TOTALEMENT DÉTRUITE PAR UN INCENDIE LORS DE LA TROISIÈME, À SEBRING. SOUS CET ANGLE, LA BERLINETTE 250 FASCINE PAR SA SIMPLICITÉ ET SON ÉQUILIBRE. BAPTISÉE BERLINETTE "CHÂSSIS COURT", ELLE POSSÉDAIT UNE CARROSSERIE EN ACIER AVEC DES PORTIÈRES ET DES CAPOTS EN ALLIAGE LÉGER. FERRARI PAR EXCELLENCE, ELLE SÉDUIT PAR SON LONG CAPOT AVANT, MAIS ÉGALEMENT PAR SON ARRIÈRE TOUT EN RONDEURS. SON MOTEUR, LE V12 COLOMBO, DOTÉ DES NOUVELLES CULASSES TESTA ROSSA À SIX ORIFICES, DÉVELOPPAIT QUELQUE 240 CH. POUR BEAUCOUP D'AMATEURS, IL S'AGIT DE LA PLUS PURE, DE LA PLUS CHARGÉE D'HISTOIRE DES FERRARI DE CETTE CATÉGORIE ROUTIÈRE.
Pour
beaucoup de spécialistes, une Ferrari est une Ferrari et une Dino est une
Dino. C'est en fait Enzo Ferrari lui-même qui, lors de la conception de
la Dino, tint à établir cette nuance d'importance. En effet, après
les V12 et les V8, Enzo Ferrari mûrissait depuis quelques années
une vieille idée : construire une petite voiture équipée
d'un V6. Et comme ceux-ci avaient la préférence d'Alfredo Ferrari,
dit "Dino", le fils d'Enzo... En fait, Alfredo Ferrari ne vit jamais
rouler une Dino ni tourner un V6, puisqu'il mourut quelques mois avant ses premiers
tours au banc. La première Dino présentée officiellement
était baptisée 206 GT Spéciale et ne portait pas la marque
Ferrari. Dessinée par Pininfarina, elle fut exposée au Salon de
Turin en 1965, deux ans avant le modèle définitif. L'autre grande
innovation technique de cette Dino résidait dans la position transversale
centrale arrière du fameux V6. La Dino de référence, la 246
GT, fut construite de 1969 à 1974 à plus de 3 000 exemplaires. Bien
sûr, la différence majeure entre la 206 et la 246 résidait
dans les cylindrées des deux V6, respectivement de 1987 cm3
et 2419 cm3, mais ce n'était pas la seule. La 246 était
un peu plus longue (+ 6 cm), et son bloc-moteur, coulé chez Fiat, 4 était
en fonte, avec un carter de transmission en alliage léger. Résultat
: un poids et une puissance en hausse de 150 kg et de presque 20 ch.
Attention
à pas confondre Dino et Dino Fiat. En effet, c'est au même Salon
de Turin que fut révélé un cabriolet dessiné par Pininfarina.
Son moteur, pour des raisons de réglementation propre aux Formule 2, devait
être issu d'un bloc de série. C'est donc en collaboration avec le
groupe Fiat que ce moteur fut élaboré. Fiat décida d'en équiper
une série de 500 unités, d'où l'existence de cette Fiat à
moteur Ferrari. Il s'agissait historiquement de la troisième génération
de moteurs Ferrari Dino V6.
L'APPARITION DES PREMIÈRES DINO, DU NOM DU FILS DISPARU, REPRÉSENTAIT, AUX YEUX D'ENZO FERRARI, LA NAISSANCE D'UNE MARQUE À PART ENTIÈRE, À VOCATION POPULAIRE, ET ELLES NE PORTAIENT DONC PAS LE SIGLE FERRARI. CETTE DINO 206 GT, CARROSSÉE PAR SCAGLIETTl EN ALUMINIUM, FUT PRODUITE À 152 UNITÉS. ELLE FAISAIT PREUVE D'UN SUPERBE TEMPÉRAMENT, "TAPANT" LARGEMENT LES 200 KM/H, 225 KM/H TRÈS EXACTEMENT POUR CELLE QU'UTILISAIT QUOTIDIENNEMENT SERGIO PININFARINA. LA FABRICATION DE LA 206 GT FUT INTERROMPUE EN 1969 POUR CÉDER LA PLACE À LA 246 GT, PUIS EN 1972 APPARUT UNE VERSION DÉCOUVRABLE APPELÉE 246 GTS. LA PETITE VOITURE ÉTAIT UN VIEUX FANTASME DE MARANELLO, PUISQUE FUT LONGTEMPS ÉLABORÉ UN PROTOTYPE, "LA MITRAILLETTE", 6 ÉQUIPÉ D'UN MOTEUR DE 850 CM3. BELLE ET AGRESSIVE, LA 106 GT, LIVRÉE AUX PREMIERS CLIENTS EN 1968, POSSÉDAIT SURTOUT UN COMPORTEMENT SPORTIF REMARQUABLE.
Extrait de "Les Ferrari en 1000 photos" de F. Parmentier et A. Haas