Chrysler Viper

Porsche et Ferrari n'auraient aucune chance. Même la Chevrolet Corvette ne serait plus une menace. Elles étaient toutes largement à la portée de LA voiture de sport américaine des années 1990. Car une Chrysler Viper peut passer de 0 à 100 km/h en seulement 4 secondes. Certes, elle coûte quand même autant que la moins chère des Ferrari ou des Porsche.
Même en première, cette voiture atteint 120 km/h, soit une vitesse supérieure aux limitations générales de la plupart des pays et il reste cinq rapports. Mais le confort est relatif et l'on s'installe au volant comme au travail, sans espoir de conduire détendu.
La Viper offre des accélérations à couper le souffle qui n'ont plus rien d'humain. Ses roues arrière motrices, chargées de transmettre les 406 ch à l'asphalte, n'ont pas la tâche facile, surtout sur le mouillé. Et comme la voiture coûte le prix d'une petite maison, les acheteurs ne se bousculent pas.
Ainsi, cette voiture présente plus d'un défaut. C"est pourtant une merveille de mécanique. Appelée en réalité Dodge Viper, mais Chrysler Viper pour le marché européen pour des raisons inconnues, elle a commencé sous les traits d'une étude de style pour une voiture de sport destinée au Salon de Detroit de 1959. Chrysler veut démontrer que le groupe a des idées futuristes susceptibles d'être appliquées à des modèles de production.
Mais cette attitude ne plaît guère aux clients : ils veulent une Viper, et tout de suite. Beaucoup d'Américains voient dans la Viper la machine prête à battre Porsche et Ferrari. C'est une source de fierté pour l'industrie nationale que d'avoir un modèle de sport capable de lutter contre les classiques européennes. Un an après seulement et quelques prototypes destinés à tester la capacité de la Viper à être produite en série, sa mise en fabrication est approuvée par le légendaire directeur de Chrysler, Lee lacocca.
Un an après ces événements, la voiture est mise sur le marché au rythme modeste, pour une firme américaine, de 500 voitures par an. Mieux encore, elle est passée de l'état de voiture de rêve à celui d'une véritable automobile en trois ans seulement et, ça, c'est un record.
La recette de la construction de la Viper est élémentaire un cadre robuste, un gros moteur et une carrosserie très légère avec des roues arrière motrices. Sa structure ne fait preuve de rien de remarquable, mais la façon dont elle est construite est originale.
Le propre V8 de Chrysler est rejeté parce que trop petit. Et acheter un moteur à la concurrence n'est pas concevable. Les camions Dodge utilisent un moteur V10 de grosse cylindrée, lourd, encombrant et peu moderne, mais puissant. Un de ces moteurs est expédié chez Lamborghini en Italie (propriété de Chrysler) qui le reconstruit. Le bloc et la culasse sont coulés en aluminium et pas en fonte, et Chrysler se retrouve aussitôt avec un groupe tout à fait convenable pour la Viper, avec plus de 400 ch.
Sur le cadre, construit en éléments caissonnés avec un renfort central constitué par le tunnel de transmission, sont assemblés des panneaux de carrosserie très légers. La carrosserie est en matière plastique, non pas moulée d'une pièce en résine et fibre de verre, mais constituée selon la méthode dite RTM à base de pièces formées par pressage à chaud dans des moules spéciaux. Si la méthode est déjà employée pour produire des seaux ou des appareils sanitaires, c'est sa première application en automobile.
Loin d'être un vulgaire siège de toilettes, la Viper offre une expérience inoubliable. Lâchez l'embrayage et accélérez vous vous enfoncerez alors dans le siège sous l'effet de l'accélération. En enclenchant la deuxième et si vous continuez à accélérez, vous aurez beaucoup de mal à justifier cet excès de vitesse caractérisé.
Dans les pays à limitation générale de vitesse, la Viper est une menace constante pour le permis de conduire. Même à l'arrêt, ses formes suggèrent les forfaits qui se préparent. La position de conduite tout à fait fonctionnelle ne sera pas confortable pour les gens plus grands que la moyenne et le courant d'air déplacé est plus proche de la tornade que de la brise dans les cheveux. L'expérience rappelle celle d'un tour dans un terrifiant grand-huit, pour beaucoup plus cher évidemment. Sinon, la Viper aurait tout pour plaire
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Extrait de "Les Voitures du Siècle" chez Gründ