Alfa
Romeo 8C 2300 | |
Alfa Romeo a toujours été réputé pour ses moteurs double arbre. Celui de la 8C 2300, un huit-cylindres en ligne de 142 ch, fut l'un des meilleurs. En compétition, il s'imposa aux 24 Heures du Mans et aux Mille Miglia.
En
1931, entre la voiture qui gagna la Targa Florio et celle qui, quelques mois plus
tard, s'imposa au Grand Prix d'Italie, il y avait un point commun inhabituel.
Toutes les deux étaient pilotées par le grand Tazio Nuvolari, mais là n'était
pas l'analogie. Non, le point commun étonnant était un sensationnel moteur, le
huitcylindres en ligne 8C 2300, aussi performant dans la grande épreuve routière
que sur le circuit de Monza. Avec ce moteur, Alfa Romeo tenait l'une des plus
grandes réussites techniques de l'entre-deux-guerres.
Le créateur de ce moteur
d'anthologie fut Vittorio Jano, qui avait rejoint Alfa Romeo en 1923 à l'âge de
trente-deux ans. Pendant; une douzaine d'années, il avait contribué à l'essor
de Fiat tant dans le domaine des voitures de tourisme que dans celui de la compétition,
dont il dirigea le service.
A cette époque Fiat dominait les Grands Prix et,
dès qu'il arriva à Milan, Jano mit en chantier une voiture de Grand Prix pour
Alfa Romeo, qui fut opérationnelle en 1924. Cette voiture, animée par un moteur
2 litres à compresseur qui allait trouver sur son chemin les Fiat et les Sunbeam
conçues par Vincenzo Bertarione - un autre ancien de chez Fiat -, entra immédiatement
dans l'histoire. En effet, dès sa première participation au Grand Prix d'Europe,
à Lyon, la P2 s'imposait et, l'année suivante, elle gagnait le premier Championnat
du monde des Marques.
La deuxième tâche de Jano fut de concevoir une voiture
de tourisme.
Première sortie, première victoire
Jano
mit en chantier une voiture toujours animée par un six-cylindres, mais elle était
plus légère et la cylindrée de ce moteur à arbre à cames en tête ne dépassait
pas 1 500 cm3. Cette voiture de tourisme connut rapidement des évolutions,
notamment une version à compresseur qui fit d'elle une redoutable voiture de course,
vainqueur des Mille Miglia et des 24 Heures de Belgique, à Spa, en 1928. En 1929,
la cylindrée passa à 1 750 cm3 et, pendant deux saisons, elle s'imposa
dans quasiment toutes les épreuves européennes à l'exception du Mans.
En 1931,
le contexte économique n'étai guère favorable aux voitures d'exception e la faillite
de Bentley était là pour en attester. Quoi qu'il en fût, Alfa Romeo lança la 8C
2300 qui venait rejoindre la 1750. Cette nouvelle machine signée Vittorio Jano
avait la même cylindrée unitaire que la 1750 mais, au total, elle était supérieure
car il y avait huit cylindres. Si le moteur était entièrement nouveau, Jano avait
utilisé au maximum les composants de la 1750.
La 8C 2300 fit ses grands débuts
en avril 1931, aux Mille Miglia. Nuvolari-Guidotti et Arcangeli-Bonini en pilotaient
2 exemplaires carrossés par Zagato. Ces deux équipages menèrent la course provisoirement
devant le futur vainqueur, Rudolph Caracciola sur l'énorme Mercedes SSKL 38/250
7 litres à compresseur. Mais toutes connurent des problèmes, essentiellement à
cause des pneus. Arcangeli heurta un mur près de Vérone et abandonna. L'autre
Alfa, malgré une sortie de route, parvint à terminer neuvième.
Mainmise sur les 24 Heures du Mans et les Mille Miglia
Un
mois plus tard, à la Targa Florio, les choses furent bien différentes
avec les deux 8C 2300 pilotées par Nuvolari et Arcangeli. Sur la recommandation
de Jano, le premier accepta que sa voiture soit équipée de garde-boue,
ce que refusa le second. Bien en prit au grand tazio qui, sous la pluie, vint
facilement à boue de Varzi (sur Bugatti 51) et remporta la première
d'une longue série de victoires. La deuxième vint quinze jours après,
au Grand Prix d'Italie à Monza, couru pendant 10 heures. Campari-Nuvolari et Minoia-Borzacchini
réussirent le doublé devant deux Bugatti. Ce triomphe valut à la 8C 2300 le surnom
de « Monza ». Parallèlement aux modèles de course, Alfa Romeo produisait des versions
« civilisées » à châssis long ou court, animées par un moteur de 142 Ch à 5 000
tr/mn. Les carrosseries, coupé ou cabriolet, étaient signées Zagato, Touring et
Castagna. Sur les versions compétition, la première configuration, connue sous
le nom de Spider Corsa deux places, était réservée à des épreuves comme les Mille
Miglia et la seconde, à quatre places, à des courses où la vitesse de pointe primait,
comme au Mans, d'où son appellation Le Mans. Quant à la Monza, elle avait un empattement
encore plus court que la Spider Corsa. Sur ces modèles, la puissance passa de
155 ch en 1931 à 165 puis à 180 de 1932 à 1934.
En plus des épreuves déjà évoquées,
et toujours en 1931, la 8C 2300 s'imposa aux 24 Heures du Mans (Birkin-Howes).
Cette domination mancelle allait durer jusqu'en 1934. A cela, il faut ajouter
une mainmise sur les Mille Miglia et de nombreuses victoires en Grand Prix. Dans
les années 30, l'Alfa Romeo 8C 2300 était une star.
Au volant de la 8C 2300 : Une sportive pure et dure L'Alfa
Romeo 8C 2300 n'était pas avare de performances. Dans sa version civilisée, elle
affichait déjà un respectable 171 km/h. Quant aux voitures des épreuves d'endurance,
elles atteignaient 209 km/h, et les Monza dépassaient les 225 km/h. En revanche,
s'installer à bord d'une 8C 2300 et tenter de la piloter au mieux de son potentiel
n'était pas une chose évidente, compte tenu de la difficulté à trouver une bonne
position. On a plutôt le sentiment d'être assis sur la voiture que dedans et,
à moins d'être vraiment petit, on distingue la route par-dessus le parebrise.
C'est peu dire que l'habitacle est étroit, et les trois pédales sont incroyablement
rapprochées avec, subtilité, l'accélérateur au milieu afin de faciliter la manoeuvre
« pointe-talon ». |
L'Alfa Romeo 8C 2300 à la loupe
En 1930, Alfa Romeo avait besoin d'un nouveau modèle pour rester compétitif sur la scène sportive internationale et donner un nouveau souffle à son image de marque. En la personne de Vittorio Jano, Alfa Romeo possédait l'un des plus grands ingénieurs d'avant guerre. En partant sur les bases de la très réussie 1750 à six cylindres en ligne, il créa ce qui devait être l'un de ses chefs-d'oeuvre, la 8C 2300 à huit cylindres en ligne, avec une commande des arbres à cames en tête sur le centre du vilebrequin. Si ce n'était pas le premier Alfa de ce type, c'était en tout cas le plus abouti, démontrant une grande souplesse d'utilisation. Fiable et puissant, il triompha en Grands Prix et dans les courses d'endurance. La 8C 2300 fut produite à 188 exemplaires entre 1931 et 1934, un chiffre important pour ce type de voiture.
Style
Dans les années 30, pour les voitures haut de gamme, les constructeurs fabriquaient
les châssis équipés de tout l'ensemble mécanique puis les clients les confiaient
à un carrossier pour qu'ils les habillent. Ce fut le cas pour l'Alfa Romeo 8C
2300, qui inspira tous les grands noms italiens de l'époque, tels Touring, de
Milan, Castagna et Zagato. C'est ce dernier qui émergea avec une carrosserie très
caractéristique de l'entre-deuxguerres réalisée sur le châssis court. Touring
réalisa une carrosserie assez proche de celle de Zagato mais avec une grille de
calandre inclinée. En revanche, la Monza (dessin ci-dessous) fut exclusivement
conçue pour la course et l'efficacité prit le dessus. A partir de 1932, elle fut
plus étroite, la réglementation autorisant les monoplaces.