Olivier Gendebien

Né le 12 janvier 1924, cet authentique aristocrate vécut au Congo Belge. De retour en Europe, il se lança dans les rallyes, ne tardant pas à devenir une référence en la matière. L'éclectisme de son pilotage fit de lui l'homme rêvé pour le Tour de France, qu'il remporta 3 fois sur Ferrari 250 GT, en 1957, 58 et 59. Mais, c'est au 24 Heures du Mans que le talent de Gendebien s'exprima le mieux. En 8 participations seulement, il s'y imposa 4 fois, soit une fois sur deux!

Après ses débuts prometteurs sur Porsche en 1955, il fut engagé par la Scudéria Ferrari. Il partagea deux fois le volant avec Maurice Trintignant mais, en Phil Hill, il trouva le coéquipier idéal. S'entendant à merveille, alliant rapidité et respect de la mécanique, les deux hommes allaient devenir l'équipage N°1 des courses d'endurance. Leur première victoire au Mans, en 1958, fut obtenue dans des conditions météo apocalyptiques mettant en exergue leurs qualités d'adresse et de discernement. En 1960, Gendebien remporta son 2e succès manceau en compagnie de Paul Frère. Reconstitué en 1961, le tandem Gendebien-Hill livra un duel épique aux jeunes frères Rodriguez, dont il sortit vainqueur et, en 1962, Gendebien prit la tête dès le 2e tour pour ne plus le quitter, remportant ses 4e 24 Heures.

Olivier remporta par ailleurs de nombreux succès, s'imposant trois fois aux 12 Heures de Sebring(59-60-61), à la Targa Florio (58-61-62), aux 1000 km du Nürburgring 1962, aux 12 Heures de Reims (1957 et 1958) et aux 1000 km de Paris 1960. Il est évident qu'il eut été sacré plusieurs fois Champion du Monde d'Endurance si un tel titre avait été décerné à l'époque!

Gendebien disputa aussi 14 Grands Prix de Formule 1 entre 1956 et 61, principalement sur Ferrari. Mais c'est au volant d'une Cooper-Climax du Team Yeoman Credit qu'il effectua sa meilleure saison en 1960, terminant 2e du Grand Prix de l'ACF à Reims et 3e en Belgique à Spa : deux résultats qui lui valurent la 6e place du Championnat du Monde. Mais notre homme n'était pas un sprinter et sans doute pas prêt à donner sa vie pour l'honneur du cheval cabré. Cela occasionna parfois des relations tendus avec Enzo Ferrari. Ainsi, au soir d'un 4e succès manceau faisant de lui le recordman absolu de l'épreuve, Gendebien tira sa révérence avec son élégance coutumière:

« J'avais le choix entre perdre et mourir. J'ai choisi une troisième option : rester en vie », dira-t-il.

Quant au Commendatore, il rendit à son pilote un hommage aussi bref que précis dans ses mémoires: « Gendebien est un gentleman qui n'oublie jamais que noblesse oblige et, lorsqu'il est au volant, il traduit ce code moral en une énergie élégante et judicieuse.

Il conduit sans heurt, il veille sur sa voiture et on peut compter sur lui pour tourner avec une précision d'horloge dans toutes les épreuves qui exigent de la régularité, du caractère et du bon sens ». N'est-ce pas là le portrait type du pilote des 24 Heures du Mans?

Olivier Gendebien s'est éteint le 2 octobre 98, à l'âge de 73 ans.

Extrait de « La Vie Mancelle et Sarthoise » N°345

La science de la course

Toujours co-recordman des victoires consécutives en Sarthe à ce jour, Olivier Gendebien aura donc quitté cette terre (en octobre 1998) sans connaître le nom de celui qui, un jour, le battra au palmarès des 24 Heures. Ce pied de nez du destin n'aurait certainement pas déplu à ce Belge qui aimait tant la vie et qui l'abordait avec une élégance toute naturelle.
Quand Olivier découvrit le circuit du Mans pour la première fois, recruté par Neubauer, nous étions en 1955. Pilote de réserve, il ne sera finalement pas retenu par le patron de Mercedes-Benz qui lui préférera un certain Pierre Levegh. Sous le coup de la déception, bien d'autres auraient renoncé. Mais Olivier préfère rester sur le circuit de la Sarthe et finalement trouver place à bord d'un spider Porsche. Son opiniâtreté sera récompensée par une belle 4e place au scratch ce qui, pour un début aussi impressionnant (il passe au milieu des flammes juste après la catastrophe), montrait déjà sa brillante faculté d'adaptation. Trois éditions plus tard, alors qu'il est déjà âgé de 34 ans, le nom de Gendebien, associé à celui de l'américain Phil Hill, va passer à la postérité.
Désormais pilote officiel de la Scuderia, il impose avec brio la Ferrari 250 TR à l'issue d'une course marquée par des conditions délicates d'adhérence. C'est aussi la première victoire d'un Belge et l'on se doute de la fierté qu'il éprouva à cette occasion. Mais il s'empressa aussi de rendre hommage à son coéquipier avec lequel il partageait sa manière bien à lui d'aborder les courses d'endurance, c'est-à-dire avec beaucoup d'intelligence et de patience.
Par la suite, Gendebien vaincra à nouveau trois fois au Mans avec un sens tactique vraiment impressionnant et un panache jamais pris en défaut. En 1960 par exemple, il offre à son équipier Paul Frère la joie de franchir la ligne d'arrivée pour sa toute dernière compétition. L'année suivante, de nouveau épaulé par Phil Hill, il maîtrise parfaitement la fougue des jeunes frères Rodriguez. Enfin, en 1961 lors de sa dernière course, Ferrari ne trouve rien de mieux que de proposer le tout nouveau 4 litres au couple mythique. Qu'à cela ne tienne : Hill-Gendebien vont ménager au maximum leur monture et prouver de manière définitive qu'au Mans, il faut aussi savoir conduire avec sa tête. Quatre victoires en cinq éditions consécutives; personne n'a jamais fait mieux depuis. "' G.H.

Extrait de "Le Mans Racing" n°10 Octobre / Novembre 2002

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